Alerte générale ! La Commission européenne vient d’infliger à Google une amende record de 4,3 milliards d’euros, pour abus de position dominante. Les griefs de l’UE concernent principalement Android, le système d’exploitation mobile développé par la firme. Au fond, nous nous sommes intéressés de près aux reproches de la Commission européenne et avons analysé les arguments de Google en retour. Alors quels sont les reproches de la Commission ? Quelles sont les réponses de Google ? CEA a fait le point.

– Des ventes liées :
Selon la Commission européenne, Google se serait livré « à une vente illégale de l’application Google Search et du navigateur Google Chrome en faisant « en sorte que ces produits maison soient pré-installés sur pratiquement tous les appareils Android vendus en Europe ». ON peut y voir une technique de dissuasion vis-à-vis des fabricants de pré-installer des applications de recherche et de navigation concurrentes et les utilisateurs de télécharger des solutions tierces.
A cela, Google oppose que « […] Grâce à Android, un téléphone classique sort avec 40 applications préinstallées conçues par de multiples développeurs, pas uniquement de l’entreprise à qui vous avez acheté l’appareil. »

– Des incitations financières :
Google a accordé des incitations financières importantes à certains des plus gros fabricants d’appareils ainsi qu’à des opérateurs de réseaux mobiles, à la condition qu’ils pré-installent exclusivement Google Search sur toute leur gamme d’appareils Android. La Commission y voit là un préjudice porté à la concurrence du fait de la réduction significative de leurs incitations à pré-installer des applications de recherche concurrentes.
A cela Google répond qu’il a choisi d’offrir Android aux fabricants de téléphone et aux opérateurs mobiles gratuitement. Bien sûr, il ajoute qu’il y a eu des coûts associés au développement d’Android et en ce sens, il a investi des milliards de dollars ces dix dernières années pour faire d’Android ce qu’il est aujourd’hui. Cet investissement est pertinent car il lui permet d’offrir aux fabricants de téléphone l’option de pré-installer une suite d’application Google populaires (telles que Search, Chrome, Play, Maps et Gmail), certaines générant des revenus pour Google et toutes aidant à ce que le téléphone « marche tout simplement » dès sa sortie de la boîte. Les fabricants de téléphone ne sont pas obligés d’inclure les services de Google et ils sont également livres de pré-installer des applications concurrentes à côté des leurs. Cela signifie que Google ne gagne de l’argent que si les applications sont installées et si les gens choisissent d’utiliser les applications à la place de celles des concurrents.

– Les « forks » entravés :
La Commission considère que Google a empêché des fabricants d’appareils d’utiliser une autre version d’Android non approuvée par elle (forks Android). Pour pouvoir pré-installer sur leurs appareils les applications propriétaires de Google, y compris Play Store et Google Search, les fabricants devaient s’engager à ne développer ou vendre aucun appareil fonctionnant sous un fork android.
Sur ce point précis, Google considère que la décision néglige le fait que les téléphone Android concurrencent les téléphones IOS, ce que 89% des répondants à la propre enquête de marché de la Commission ont confirmé. Aujourd’hui, grâce à Android, il y a plus de 24.000 appareils à tous les niveaux de prix, de plus de 1.300 marques différentes, y compris des fabricants néerlandais, finlandais, français, allemands, hongrois italiens, lettons, polonais, roumains, espagnols et suédois. Les téléphones fabriqués par ces entreprises sont tous différents mais ont une chose en commun : la capacité à faire tourner les mêmes applications. Cela est rendu possible grâce à des règles simples qui assurent la comptabilité technique, peu importe la taille ou la forme de l’appareil. Aucun fabricant de téléphone n’est même obligé de souscrire à ces règles : ils peuvent utiliser ou modifier Android de quelque façon qu’ils veulent, ainsi qu’Amazon l’a fait avec ses fire Tablets et ses TV sticks.

Immédiatement après l’annonce de la décision, Google a annoncé se volonté de faire appel.
La décision en appel n’a pas encore été rendue. Tant pour l’affaire Android que Google Shopping, Google pourrait aussi se tourner vers la Cour de Justice de l’Union européenne en dernier recours.
Plus largement, rappelons que les affaires d’antitrust sont systématiquement combattues par les entreprises visées. Ces dernières font appel de la décision, ce qui retarde l’échéance. Qualcomm, condamné à 997 millions d’euros en janvier dernier, ou encore le laboratoire Servier, condamné à 331 millions d’euros en 2014, sont ainsi toujours en instance de jugement. Google devrait donc jouer la montre et ce, malgré le fait qu’il risquait jusqu’à 6,45 milliards d’euros d’amende, soit 10% de son chiffre d’affaires.
Vous n’êtes certainement pas inquiet du sort de Google et on vous comprend quand on sait que l’amende entamera à peine sa trésorerie qui s’élève à 88 milliards d’euros, cela nous laisse rêveur !